Sept candidats au Conseil d’Etat sont extérieurs aux grands blocs politiques. Leurs chances sont ténues, mais ils incarnent des idées qui ne sont pas, ou peu, représentées dans la coalition au pouvoir

Mathieu Signorell, Renaud Bournoud

Deux catégories de candidats se font face dans la course au Conseil d’Etat: les «gros» et les «petits». Dans le premier paquet, on trouve les six ministres sortants, ainsi que Cesla Amarelle et Jacques Nicolet. Dans le second bloc se situent sept concurrents dont l’entrée au gouvernement paraît peu probable.

Dans le débat démocratique, les candidatures de ces sept challengers sont toutes aussi légitimes que celles des cadors du Conseil d’Etat, qui se représentent quasi tous. Ils incarnent souvent des idées politiques alternatives à celles de la coalition au pouvoir. Et ces outsiders ont bien compris que la course au Château cantonal offrait une vraie occasion de faire entendre leur voix dans le débat public.

Selon le sondage de Sotomo publié mercredi, le Vert’libéral François Pointet serait le meilleur d’entre eux, avec 11% des intentions de vote, bien loin derrière les 34% de l’UDC Jacques Nicolet, dernier des «grands» candidats, et encore plus loin des 56% de Pierre-Yves Maillard et de Pascal Broulis.
Les centristes divisés
Pour Emmanuel Gétaz, président de Vaud Libre, les candidats centristes répondent aux attentes de Vaudois qui «ne veulent pas des conflits entre deux grands blocs, comme en France ou aux Etats-Unis». «Certains partis ont traversé des décennies avec des scores de 10%, mais ont touché énormément la politique d’un endroit. L’apport politique d’un parti non majoritaire peut être extrêmement bénéfique au canton.» L’idée est aussi d’offrir une alternative aux «extrêmes» comme il dit, pour contrer la «tentative de la droite de faire entrer un blochérien au gouvernement», référence à l’UDC Jacques Nicolet.

Axel Marion, président du Parti démocrate-chrétien (PDC), rejoint cette analyse: «Pour un parti comme le nôtre, atteindre le Conseil d’Etat est très difficile. Nous ne sommes pas naïfs. Mais présenter une candidature vaut la peine. En France, par exemple, des candidats qu’on disait enterrés ont fait des percées.» Il rappelle aussi l’exemple du canton de Fribourg, qui comptait jusqu’en 2011 un conseiller d’Etat indépendant, en la personne de l’agriculteur Pascal Corminboeuf.

Les centristes ont beaucoup à perdre cette année, ce qui donne d’autant plus d’importance à chaque miette de visibilité qu’ils peuvent glaner. Les Vert’libéraux font cavalier seul au Conseil d’Etat après avoir voulu s’allier avec le PLR et l’UDC, tandis que des alliances avec le PDC se sont créées dans certains districts pour le Grand Conseil. Après plusieurs mois de campagne, François Pointet – candidat et président des Vert’libéraux – parle d’une «fâcherie de façade». Pour lui, cette campagne servira aussi à profiler un candidat. «Nous fonctionnons sur le moyen terme, voire le long terme. Si j’ai accepté de me présenter, je vais essayer de rester présent à l’avenir.»

Les partis du centre pourraient rester en course au second tour. La conseillère nationale vert’libérale Isabelle Chevalley a même dit publiquement son intérêt. Mais aucune décision formelle n’a été prise.
La gauche radicale unie
Sur la gauche de l’échiquier politique, le ticket d’Ensemble à Gauche pour le Conseil d’Etat compte trois candidats issus de trois courants: Décroissance-Alternatives, POP et SolidaritéS. «L’essentiel pour nous, en nous présentant au gouvernement, est de faire connaître notre programme politique», indique Hadrien Buclin, de SolidaritéS. «C’est une candidature de combat parce que le projet que nous défendons est encore minoritaire, mais ce n’est pas une candidature de façade, prévient Yvan Luccarini, de Décroissance-Alternatives. Je suis convaincu qu’une grosse partie des problèmes que rencontre le canton est due au gouvernement actuel. Le critiquer est une chose, mais il faut également proposer une alternative.»

Bien sûr, ces candidatures ont aussi pour rôle de tirer la liste au Grand Conseil. «C’est important que le tissu associatif et syndical puisse avoir un relais au parlement», estime Hadrien Buclin. Mais c’est difficile d’envisager une liste au Grand Conseil sans avoir de candidats pour le Château, selon eux. «Aujourd’hui, les projecteurs médiatiques sont essentiellement braqués sur l’élection au Conseil d’Etat», observe Yvan Luccarini.

La coalition de la gauche radicale n’a pas encore arrêté sa stratégie pour le deuxième tour.
Un indépendant nommé «Toto»
Le cas de Guillaume Morand, dit «Toto», est particulier. Ce patron de magasins de chaussures n’est pas affilié à un mouvement, hormis le sien: Parti de Rien, dont il est l’unique représentant. Le Lausannois avait déjà tenté sa chance lors des élections cantonales de 2012. A l’époque, il ne s’est pas maintenu au deuxième tour. Même si son score de 5,74% le lui permettait. Il devrait en aller autrement cette année. Sous réserve du score qu’il obtiendra au premier tour, Guillaume Morand pense se maintenir au second. «Ainsi je pourrai faire trois semaines supplémentaires de campagne», remarque-t-il. La caisse de résonance qu’offrent les élections cantonales lui permet de porter dans le débat public les thèmes qu’il juge «cruciaux».
Cinq partis seulement au parlement
Certains partis ont fait l’impasse sur le Conseil d’Etat, pour se concentrer sur le Grand Conseil, dans certains districts. Il s’agit du Parti pirate, du Parti libéral-conservateur (scission de l’UDC après l’exclusion de Claude-Alain Voiblet) et des Indépendants vaudois (avec un seul candidat), ainsi que deux organisations de la droite dure: le Parti nationaliste suisse (PNS) et l’Alternative populaire suisse. «Entrer dans la campagne au Conseil d’Etat serait revenu à mettre la charrue avant les bœufs», commente Guillaume Saouli, président du Parti pirate, qui comptait 1,2% des voix aux élections fédérales. «Dans le canton, les différentes équipes sont très fortes, ajoute-t-il. Représenter une voix parmi une vingtaine de candidats au Conseil d’Etat, je ne suis pas sûr que les Vaudois auraient trouvé ça très adéquat de notre part.»

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